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Publiée le 02/05/2013 à 16:05, par Daniel

Japan Game Center n°7 : Zelda, la souveraine en exil

Quelques jours après l'annonce du nouveau Zelda sur 3DS, Daniel fait un point, très personnel, sur la licence de Nintendo.

De tout le patrimoine Nintendo, la licence la plus écornée au Japon est sans doute Zelda. Elle n'est plus cette valeur forte qu'elle est devenue au fil des années en Occident. Au Japon, les ventes du vaisseau amiral de Nintendo sont à l'image de sa qualité habituelle : plutôt solide mais dépassionnée, parfois décevante.

Attention, le but ici n'est pas de pointer du doigt ce qui ne fonctionne plus chez Zelda. Même dans le mineur, ce sont généralement d'excellents jeux. D'ailleurs plus personne ne se risque à faire des action-RPG du même acabit aujourd'hui, ce qui pourra faire l'objet d'un autre édito, un jour. Et puis, d'autres ont déjà analysé en longueur ce qui leur paraît dérailler un peu de la formule originelle.
Il s'agira ici de voir comment un jeu purement japonais est devenu un pur produit d'exportation, un peu comme Naruto, manga numéro un à l'étranger mais dans une espèce de ventre mou de popularité dans son propre pays.

Notre HyruleRetour au sommaire
Commençons par un flashback. Zelda et moi, c'était le coup de foudre, même si je n'avais pas de NES à l'époque. Il fallait squatter chez quelqu'un qui en avait une ou échanger sa Master System en assurant à ses potes que « ouais, tu verras, Ys c'est génial ». Je ne mentais pas, Ys est fabuleux mais incomparable avec la mécanique parfaite de Zelda premier du nom. A Link To Past est encore un de mes jeux préférés de tout le temps, intouchable et inégalable.

zelda : majora
Je crois que le premier grain de sable était venu de Majora's Mask, typiquement un jeu que j'aurai aimé adorer. Commencé trois fois, de multiples manières et à différentes périodes de ma vie, mais rien à faire. Majora's m'est toujours tombé des mains alors que son concept de base avait tout pour me plaire. Aujourd'hui encore je ne me l'explique pas. Trop de dialogues ? Ambiance décalée ? Mécanisme ultra répétitif du temps qui se reboote ? Dans tous les cas, c'est mon acte manqué.

Le bilan des coursesRetour au sommaire
The Legend of Zelda : The Wind Waker
Un bon ami me disait que j'avais sans doute une préférence pour les épisodes produits par Tezuka à ceux d'Aonuma, le nouvel intendant de la série maintenant que Miyamoto s'occupe globalement de la société alors que, mine de rien, Nintendo prépare l'après-Shigeru. Il a sans doute raison : les Zelda des 10 dernières années m'ont passablement désintéressé. Malgré sa direction artistique folle et quelques passages géniaux, The Wind Waker a tué mon excitation en noyant les Triforce dans la flotte. Glissons sur l'overworld de Twilight Princess qui m'a ennuyé cosmiquement (le meilleur dans Twilight Princess, c'est son partenariat avec Zelda Williams).



Et Skyward Sword, bon sang, fallait-il vraiment mettre les cinq six heures les plus ennuyeuses de tous les temps dans un Zelda ? Le moi de treize ans qui découvre son oncle mourant dans les premières minutes de A Link to The Past, ne l'aurait pas cru. Il n'aurait pas cru aussi voir un jour un Zelda bardé de dialogues, qui passe son temps à raconter tout sur tout. Et si possible en trois ou quatre fois, pour bien user. À des fées, des hiboux, des oiseaux, à 30 millions de PNJ fatigants. Bon dieu, au moins les épisodes DS étaient moins verbeux. Depuis quand a-t-on besoin d'avoir autant de dialogues dans cette série ? Attention, au moins on sait que dans la chronologie officielle, c'est le premier Zelda. Ouf, on est sauvé.

Le monomytheRetour au sommaire
Si j'en parle ici, c'est que c'est devenu le sujet qui faisait exploser les threads de NeoGAF. « Quel Zelda se déroule avant un autre ? », etc. LA grosse question. Pour moi, Zelda avait tout d'un monomythe, un concept venu de l'écrivain Joseph Campbell dans « L'homme aux mille et un visage » Un héros. Une quête. Un voyage. Un conflit à résoudre. Link récupère à chaque fois son épée pour la première fois et zigouille Ganondorf à la fin. Et on recommence au prochain numéro. La plupart des jeux Nintendo répondent à ce schéma. Par exemple, Pokémon utilise aussi systématiquement les mêmes archétypes, n'oubliant pas que chaque épisode sera sans doute le premier de toute une génération d'écoliers. Miyamoto l'a souvent dit en interview, ce qui compte, ce n'est pas tant les personnages que la mécanique.

Dans la pop-culture américaine, la continuité est un concept important. Prenez les comics, les X-Men ou les Avengers et leurs ramifications complexes. Essayez de comprendre quelque chose à l'arbre généalogique de Cyclops et ses 3 enfants dont deux venant de futur alternatif. Regardez Marvel qui se fabrique un univers cohérent jusque dans les salles de cinéma. Et même Injustice essaye de justifier maladroitement une histoire, comme s'il y avait besoin de raison à casser la gueule de Superman avec Batman. Le monde d'Injustice se donne ce mal, expliquant dans une bd préquelle que Superman, drogué par le Joker, a envoyé par accident Loïs Lane enceinte de son enfant dans l'espace. Ce qui explique sa mauvaise humeur et qu'il bouge comme Sub Zéro et Johnny Cage. Donnez-moi une aspirine.

Culturellement, au Japon où l'on reconstruit régulièrement tout, on ne s'intéresse généralement pas trop à ces histoires de continuité. Les mangas ne sont pas exempts de reproches puisque les premiers volumes sont en général le moment où l'auteur se cherche avant de trouver le ton juste. On démolit tout et on recommence, le credo de Final Fantasy qui, jusque récemment, poussait la coquetterie jusqu'à imaginer un monde à chaque épisode. Les Dragon Quest, quand ils se suivent, le font du bout des lèvres. Et encore, c'était "avant". Pour leur clash Ryu et Cyclops n'ont eu d'autre explication qu'une poignée de main dans l'intro de X-Men VS Street Fighter). Et si vous trouvez la moindre logique autre que comique dans la saga Tekken, vous méritez une pluie d'uppercuts de pandas et de kangourous.

Un spot tv japonais pour A Link To The Past. Cultissime !

American Historia XRetour au sommaire
Devant la pression, Nintendo a finalement publié une chronologie officielle. Elle se trouve dans le formidable bouquin Zelda Historia, sorti au Japon et aux USA et bientôt en France. C'est une mine d'infos et de dessins, malheureusement non crédités comme c'est souvent le cas pour Nintendo. Si vous aimez Zelda de quelque manière que ce soit, jetez-y un coup d'œil.

Mais cette chronologie, ardemment demandée puis débattue par les fans américains, m'a laissé perplexe. En gros, Skyward est donc le premier épisode d'une trilogie (complétée par The Minish Cap et Four Swords) qui s'achève à Ocarina Of Time. De celle-ci découlent plusieurs timelines. L'une d'elles existe dans une réalité où Link a perdu dans OoT, se poursuit dans les "Oracles", Link's Awakening et se termine par Zelda 1 & 2. De fait, Zelda 2 devient le seul épisode où Link s'est effectivement débarrassé de Ganondorf en empêchant sa résurrection.

La publicité culte de Zelda II, en français.


Accrochez-vous pour la suite, la partie dite "adulte". Majora, TP et Four Swords existent dans une réalité où Link a gagné dans Ocarina of Time mais où il n'est qu'un enfant. Dans une ultime timeline (ouf !), on retrouve Wind Waker, Phantom Hourglass et Spirit Tracks dans un Hyrule inondé, repartant complètement de zéro jusqu'au retour du royaume.

Poussive et pas qu'un peu, cette chronologie officielle a tout d'un fanfic que Nintendo prêche comme canonique. À ce petit jeu-là, je peux vous pondre une chronologie officielle Super Mario, ça peut même être rigolo. À vrai dire, il serait excessif et erroné d'énoncer que c'est ce nouveau détail qui a changé le public japonais de Zelda, mais c'est un indice. Ce n'est pas la raison du déclin de Link dans son propre pays mais cela marque un basculement dans la stratégie de Nintendo, tournée vers l'Occident. Il ne manquait plus qu'une suite à A Link To The Past... la voilà. Alors que les fans frémissent à l'idée que l'on touche au mythe de l'enfant prodige, les Japonais sont encore impassibles. Qui sait, entre les éternels grappins, boomerangs et autres flèches, la nostalgie annoncera peut-être le retour en grâce dans son pays d'origine.

Hyrule historia
Hyrule historia
Hyrule historia
Hyrule historia
Quelques pages issues de la version anglosaxonne d'Hyrule Historia.


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